Changement dans les soins de première ligne
« Rien n'est permanent, sauf le changement », cette citation du philosophe grec Héraclite nous semble particulièrement pertinente dans le domaine de la santé.
Partout dans le monde, les systèmes de santé sont en état de changement quasi constant.
Les raisons de ces cycles constants de changement sont nombreuses, et comprennent les hausses de coût, l'évolution des maladies, les changements démographiques, les transformations technologiques et les perspectives politiques fluctuantes. La plupart des changements dans le domaine de la santé dont nous entendons parler sont de grande envergure et centralisés et reposent sur des leviers politiques et politiques - souvent accompagnés d'une injection ou d'une réaffectation importante des ressources. Il est fort probable que ce type de changement se poursuivra, mais est-ce la seule façon de changer les soins de santé?
Cette année, trois provinces canadiennes essaient aussi une approche différente, qui repose sur la conviction que les gens peuvent faire une grande différence et que le personnel de première ligne mettent souvent la main sur le pouls (parfois littéralement) pour savoir ce qui est nécessaire pour améliorer les soins de santé.
Le 17 novembre, la Colombie-Britannique, l’Alberta et l’Ontario rejoignent un mouvement populaire mondial appelé Journée du changement. Lancé en 2013 par le National Health Service (NHS), en Angleterre, ce mouvement, s'est maintenant propagé dans au moins 15 pays.
Le nom est trompeur en fait, car cette initiative ne dure pas qu’une journée. Au cours des deux à trois mois qui précèdent la Journée du changement, les professionnels de la santé, les patients, les familles et les dirigeants de la santé s'engagent personnellement à agir et à faire de petits changements pour améliorer les soins. Les promesses sont généralement placées bien en vue dans les organismes et diffusées sur les médias sociaux.
La Journée du changement elle-même offre surtout l’occasion de reconnaître et de célébrer les promesses qui ont été faites. Après la journée de célébration, les activités associées aux promesses se poursuivent, tout comme le partage des leçons apprises afin de propager davantage les améliorations.
Au Canada, plus de 12 000 promesses ont été faites jusqu’ici, représentant tous les secteurs de la santé, et certaines représentent l'engagement de dizaines, voire de centaines de personnes.
Les engagements pris collectivement visent à améliorer les six dimensions de la qualité : des soins sûrs, efficaces, efficients, centrés sur le patient, opportuns et équitables.
Quelques promesses faites en Colombie-Britannique :
- S'identifier à l'aide de pronoms afin de mettre à l’aise les personnes qui ne s'identifient pas à leur genre apparent pour qu’elles puissent parler d’elles.
- Créer un « livre de messages d’espoir » dans lequel les clientes et clients des centres de toxicomanie peuvent laisser un message inspirant au sujet de leur rétablissement que d’autres pourront lire.
- Participer à une formation culturelle.
Les promesses faites en Alberta comprennent les suivantes :
- Utiliser des ateliers de narration numérique et des vidéos pour encourager les patientes et patients à s’exprimer.
- Ne jamais cesser de remettre en question le statu quo et de se demander pourquoi tous les enfants de l'Alberta n’ont actuellement pas la possibilité d’être en bonne santé.
- Souligner chaque jour au moins un bon geste, une bonne action ou les qualités observées chez ses collègues.
Quelques exemples de promesses faites en Ontario :
- Apprendre la langue des signes pour offrir de meilleurs soins aux patients sourds ou malentendants.
- Plusieurs réceptionnistes d’un hôpital se sont jointes au service des communications pour visiter les quatre campus de l'établissement et expliquer pourquoi il est important de briser la glace en se présentant aux patients et aux familles.
- Plusieurs préposés aux services de soutien à la personne d’un foyer de soins de longue durée se sont engagés à se renseigner chaque semaine sur la vie d’une résidente ou d’un résident.
Les sceptiques peuvent, à juste titre, demander : La Journée du changement fonctionne-t-elle et comment le savoir? Cette question est juste et il est difficile d'obtenir des données empiriques solides. Quelques promesses locales se sont littéralement propagées dans le monde entier comme, par exemple, la campagne « Je m’appelle » lancée par une médecin du National Health Service qui était tombée malade et s’est rendu compte que les professionnels de la santé se présentaient rarement lorsqu’ils entraient dans une pièce. De retour au travail, elle s'est promis de toujours se présenter aux patientes et patients et d’expliquer la raison de sa présence. Cet exemple s'est maintenant propagé dans le monde entier, y compris au Canada.
Toutes les promesses n’auront pas le même impact et les améliorations mesurables de la santé découlant des engagements pris à l'occasion de la Journée du changement peuvent être difficiles à quantifier. Il est utile de se rappeler que quelques mois après la première Journée du changement au Royaume-Uni en 2013, le Dr Damian Roland a écrit « le secteur de la santé est un milieu où "changement" est un terme peut-être galvaudé qui peut saper le moral. Malgré la somme de travail requise pour démontrer les bienfaits dont les patients bénéficient directement... La Journée du changement montre que la passion de l'amélioration est bien réelle et que le changement est possible.
Avec 12 000 promesses, et ce n'est pas fini, cette passion pour l'amélioration est clairement présente au Canada.